Calquons nos politiques de mobilité(s) sur l’Europe du nord.

Quand on interroge nos élus : pourquoi la pratique du vélo est-elle ici sous développée ? La réponse est souvent la même : nous n’avons pas la « culture vélo ».

Mais pourquoi diable l’Europe du nord est-elle si « cultivée », alors que le climat y est plus froid et pluvieux ? Le romano-péageois est-il un fainéant, négligeant son environnement et sa bonne santé, amoureux du bruit et de l’odeur des moteurs, trop riche pour considérer la diminution de son budget transport ? Faut-il attendre que le prix de l’essence atteigne des sommets pour enfin agir ?

On ne le pense pas. Simplement : pour un cycliste, Romans et Bourg de Péage se résument au danger permanent, une voirie désagréable et inadaptée. (voir étude de la FUB)

La question des mobilités ne se résume pas au simple vélo : les piétons sont également assez rares dans nos villes.

Il faut dire que sur cette question, tout est fait à l’envers : jusqu’à maintenant, il n’y a pas de réelle implication des pouvoirs publics.

L’implication des pouvoirs publics :

Même quand il est possible de le faire, quand on pourrait profiter d’une réfection de voirie (comme la loi l’impose), à proximité des écoles, salles de sport, cliniques et hôpitaux : le travail n’est pas toujours fait.

Bourg de Péage, avenue John Kennedy en réfection, 2020 : malgré la loi LAURE et la place disponible dans les parkings dans les immeubles, on favorise bien trop souvent le stationnement auto sur la voirie plutôt qu’un aménagement cyclable.

Les recommandations et études de faisabilité en voirie sont mises au placard (étude Ascode, Bourg de Péage, 2011).

Les zones périurbaines détruisent les terres agricoles, et rien est fait pour les relier aux villes-centre. Les élus se renvoient la balle dans le millefeuille territorial, la ville renvoyant au département qui gère les routes départementales, ou à l’agglo qui gère les transports en commun, et vis et versa.

Les infrastructures sont de plus en plus éloignées des centres-ville, tels pôle emploi, la piscine, les administrations publiques (antennes agglo et département, bientôt les centres d’impôts ?), zones commerciales et médicales (Parc Saint Paul, Pizançon)

Absence de communication sur les bienfaits du vélo n’est faite dans la communication officielle.

Les intersections et feux rouges, ne sont pas sécurisés. Des rues qui pourrait être à sens unique ne le sont pas, intensifiant le trafic automobile dans des zones résidentielles.

Les zones 30 sont presque inexistantes.

Lubie d’écolo, ou rationalité économique ?

Les commerçants semblent imaginer que seuls les automobilistes achètent vêtements et nourriture.

Par facilité, et dans une vision de court terme, les élus favorisent trop souvent le stationnement dans les rues plutôt que d’aménager des parkings dédiés, renforçant ainsi le trafic.

Beaucoup d’élus pensent qu’il s’agit d’une lubie écologique, avec en arrière pensée les revendications du bobo urbain. Au contraire, en Europe du nord, l’aspect environnemental n’est qu’un élément parmi d’autres : la valorisation du vélo s’inscrit dans une logique d’urbanisme globale et rationnelle, aussi bien d’un point de vue économique que du bien être des habitants.

Dans les villes moyennes, dans une famille, au moins un des 2 parents habite à proximité du travail. Et cet habitant de Bourg de Péage de dire : « C’est un coup à prendre, on y fait même plus attention. En faisant plus de vélo, nous avons pu supprimer un des 2 véhicules familiaux. Nous économisons environ 5000 euros par an (coût annuel moyen d’un véhicule rapporté sur 1 an = 6000e), c’est l’équivalent de 3 treizièmes mois. Ce budget est ré-investi pour la maison ou les vacances en famille ».

Pour les collectivités, l’investissement pour les mobilités douces semble couteux d’un premier abord. Sauf que, si on prend en compte les externalités (réduction des particules fines et soins de santé, réduction des embouteillages et temps de stationnement, réduction des infrastructures routières et de leur entretien), les mobilités douces sont l’investissement public le moins couteux en terme de transport.

Notre objectif doit-il tendre vers l’anarchie des rues de Bombay ou celles des villes d’Europe nordique ?

La suite de ce billet s’appuie sur un article et reportage photo paru dans le Monde Diplomatique, à propos des stratégies nordiques dans la ville de Copenhague (Danemark).

Le vélo est le moyen de transport principal pour un habitant sur 2 contre 3% en France.

Résumé :

« Copenhague s’est fixé pour ambition qu’un déplacement sur deux vers le travail ou le lieu d’études soit effectué à vélo en 2025. Et c’est déjà presque le cas : en 2018, la part du vélo dans les déplacements quotidiens représentait 49 %, contre 6 % pour la marche, 18 % pour les transports publics et 27 % pour la voiture. Par comparaison, elle n’est que de 4 % à Paris, et de 12 % à 16 % pour les villes françaises les moins en retard : Bordeaux, Grenoble et Strasbourg

S’il ne fallait qu’un chiffre pour résumer ce succès, on pourrait citer la dernière enquête d’opinion, selon laquelle 77 % des Copenhaguois se sentent en sécurité quand ils circulent à bicyclette. « Le vélo est jugé commode, fonctionnel explique Mme Marie Kåstrup, cheffe du programme vélo de la municipalité. C’est un symbole de liberté, de santé, un plaisir simple auquel tout le monde peut accéder. Il y a une dimension démocratique. »

Cet engouement ne s’explique pas prioritairement par le souci de l’environnement (seulement 16 % des réponses à l’enquête annuelle sur le sujet), ni même par le faible coût (26 %) ou par le besoin d’exercice (46 %), mais d’abord par la rapidité et surtout la facilité d’utilisation (55 % des réponses) de ce mode de transport dans une ville certes plate, mais venteuse, et beaucoup moins dense que Paris. Cela passe par des infrastructures à la fois continues, rapides et protectrices, conçues en fonction des usages et des besoins spécifiques des cyclistes.

Les feux ont été décalés dans le temps, pour donner quatre secondes d’avance aux cyclistes, et dans l’espace, pour éviter qu’ils soient gênés par les voitures. Le trottoir qu’ils devaient emprunter pour ne pas être coincés est devenu une piste cyclable. Et il n’y a quasiment plus d’accidents. »

« Faciliter les déplacements actifs, qui présentent l’avantage de demander beaucoup moins d’espace que la voiture, suppose de faire l’inverse de ce qui a été fait partout depuis les années 1950 : rendre plus compliquée la circulation des automobiles et plus simple celle des piétons et des cyclistes » poursuit Colville-Andersen. La beauté du réseau à Copenhague tient à une conception simple, uniforme et continue des infrastructures. Il en existe seulement quatre types. En fonction de la limite de vitesse imposée aux voitures, vous sélectionnez la plus appropriée. Ce modèle pourrait s’appliquer à toutes les rues du pays et à chaque ville du monde. » Dans les secteurs résidentiels de proximité, où la vitesse est limitée à 30 kilomètres par heure, autos et vélos cohabitent sur la même chaussée.

Cela fonctionne bien au Danemark, car les vitesses sont respectées et ces rues ne sont jamais utilisées pour le transit. Les voies limitées à 40 kilomètres par heure sont, elles, bordées de bandes cyclables, toujours à la droite de la circulation ou des places de stationnement quand il y en a. Le long des artères limitées à 60 kilomètres par heure, les pistes cyclables sont séparées de la circulation au minimum par une bordure, et souvent par des places de stationnement.

Enfin, lorsque la vitesse autorisée est supérieure, les itinéraires cyclables empruntent un parcours entièrement distinct de celui des voitures.

M. Klaus Bondam, à l’époque maire adjoint chargé des services techniques et de l’environnement : « J’ai reçu tellement de courriels haineux, de critiques dans la presse. Les gens étaient en colère parce que nous avions pris la décision de changer les habitudes en donnant la priorité aux piétons, aux cyclistes et aux transports publics. Beaucoup de commerçants semblaient imaginer que seuls les automobilistes achetaient des vêtements et de la nourriture… Or on a aujourd’hui une rue attractive, avec de nouveaux magasins. »

Le célèbre architecte et urbaniste danois Jan Gehl avait souligné le caractère secondaire de cet outil dans son ouvrage paru en 2010 : « Les vélos en libre-service doivent être un élément parmi d’autres d’une stratégie de développement de la culture cycliste, non leur fer de lance (4).»

Mme Sidsel Birk Hjuler, responsable des questions de mobilité pour la région de la capitale : « En mai 2018, nous avons fait une analyse socio-économique des autoroutes à vélos en appliquant la norme nationale du ministère des finances, qu’il faut suivre quand on bénéficie d’argent de l’État (5). Le rendement socio-économique des infrastructures cyclistes, qui s’élève à 11 %, dépasse largement celui de tous les autres types d’investissement

« Les bénéfices en termes de santé publique sont vingt fois supérieurs aux pertes des accidents, complète Mme Kåstrup. Il est important de se préoccuper des accidents, mais il faut surtout promouvoir le vélo. »

Une étude récente démontre que les cyclistes danois commettent beaucoup moins d’infractions que les automobilistes, a fortiori lorsqu’ils ont des infrastructures appropriées :

« On piétine dans beaucoup de pays d’Europe parce que ce mode de déplacement n’est pas suffisamment pris en considération. »

Alors, la pratique du vélo au quotidien est-elle toujours une question de culture, ou bien une volonté politique ?

Voir aussi :

Ce qui se passe en Hollande (idem en Belgique, en Allemagne, en Suède).

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