Wauquiez, le clientélisme qui va coûter cher au contribuable

En visite à Valence pour lancer sa rentrée, Laurent Wauquiez s’est illustré cette semaine par une sortie contre la loi « zéro artificialisation des sols » dont il entend ne pas respecter les termes en ne l’appliquant pas dans la région Rhône Alpes.

Pour un parti qui se nomme « républicain », ne pas respecter la loi de la république n’est pas cocasse. Et pour un politique qui se rêve dans les habits de président aux allures très jacobines, il est peu probable qu’il apprécierait que des régions aux mains de son opposition n’appliquent pas les politiques pour lesquelles il sera peut-être un jour élu.

Clientélisme et « ruralisme » au cœur de la politique de la région

Le crédo politique de Laurent Wauquiez part d’un constat plutôt juste : les politiques régionales ont souvent eu comme résultat de diriger les ressources publiques vers les grands centres urbains, au détriment de la ruralité et des villes moyennes.

Par exemple, il fustige le fait qu’un habitant des campagnes ne profite que très peu des équipements culturels et sportifs, par rapport à un urbain (ce qui est à moitié vrai, puisqu’une part importante des publics se déplace des zones rurales les plus proches)

Laurent Wauquiez tente d’écrire un récit où il se présente comme un défenseur de la ruralité contre ces écolos urbains qui ne comprennent rien à la nature. Peu importe si cet énarque, issu d’une famille de la bourgeoisie industrielle du nord est né à Lyon, a poursuivi sa scolarité à Paris pour être parachuté au Puy en Velay, quand les écolos qu’il maudit ont souvent parcouru le chemin inverse.

Mais ce « ruralisme » affiché sert surtout à justifier n’importe quoi, dont le clientélisme qui règne à tous les étages de sa politique.

Vu des énarques comme Wauquiez, la ruralité se résume à la fête du boudin et à la chasse, raison pour laquelle les subventions de la région aux fédérations ont explosé.

Avec le « pass région » (chèques d’aide pour les jeunes), les étudiants peuvent désormais toucher plus d’argent pour leur permis de chasse que pour acheter des livres ou même se nourrir !

Ainsi, les équipements culturels ont vu fondre leurs dotations au profit de festivals mainstream qui n’ont pas vraiment besoin de dotations pour fonctionner… ces festivals, dont certains sont produits par des multinationales de l’événementiel, sont bien souvent établis dans les villes tenues par les proches du maire, comme l’édition d’hiver du « Tomorrow Land » à l’Alpes d’Huez, pointé du doigt pour son bilan carbone.

Pour la sortie de Laurent Wauquiez contre le plan « zéro artificialisation des sols », justement dans la très chic station de l’Alpe d’Huez, la clientèle visée et un parterre de maire de petites communes, fâchés de ne plus pouvoir bétonner à leur guise.

Un plan «  zéro artificialisation des sols » pourtant bien en deçà des enjeux :

Ce plan est dans la droite ligne de la politique écologique macroniste : en parler beaucoup, en faire le strict minimum.

Comme beaucoup de plans pour l’écologie, on parle de réaliser ces objectifs… en 2050 ! c’est à dire que ceux qui ont conçu le plan seront déjà mort pour l’évaluer.

D’ici là les puissants lobby du ciment et de la construction (25% du bilan carbone émis en France), ont tout le temps de truffer le dispositif de nombreuses dérogations : le sénat, tenu par les républicains, a déjà bien commencé le travail.

Ce plan visait à combattre l’artificialisation en confiant aux régions la conduite effective du plan, qui devait se répercuter dans les politiques d’urbanisme sur le terrain (SCot et plans locaux d’urbanismes, aides publiques…).

Le problème avec cet objectif, c’est que de nombreux maires de petites communes, notamment les communes périurbaines, ont souvent des conflits d’intérêts dans le BTP ou dans la vente de terrains agricoles rendus constructibles avec de belles plus-value, ne pouvait plus alimenter ce business juteux mais légal, bien que fort malsain.

Construction d’Hlm à l’horizontal à Pizançon sur des terres Agricoles près de l’Isère

Ce plan n’en demeurait pas moins incomplet, puisqu’il aurait pu également s’en prendre aux parkings de supermarchés (qu’il conviendrait de « débitumiser » et de remplacer par de l’alvéolé), aux toitures inutilisées (par exemple pour produire de l’énergie), mais aussi les devantures de maisons individuelles dont les haies sont progressivement remplacées par des forteresses en parpaing, ou encore de faciliter l’habitat léger (Tiny haus, Yourtes, mobil-home…).

Mais pour ces petits maires soutenus par Wauquiez, s’en était déjà trop. Et tout le monde va devoir payer la note :

Les coûts de l’artificialisation des sols n’en finissent plus d’exploser :

L’artificialisation des sols est tout sauf une lubie d’ « écolo-terroristes »..

Elle a de nombreux impacts qui s’amplifient avec le réchauffement :

> L’étalement urbain engendre des coûts de transports importants pour les périurbains, que le contribuable doit compenser avec des « chèques énergie », puisque les élus ont trop peur de voir se reproduire des émeutes de type « gilets jaunes » ou « bonnets rouges ».

Ainsi, les chèques distribués à tout va pour compenser les hausses de prix de l’énergie ont coûté plus cher au contribuable que les aides pour améliorer les performances énergétiques du bâtie existant.

Or, ce coût des transports va de toute façon exploser, les pays producteurs de pétrole ont atteint leur pic, et les pays émergents vont prendre une partie importante de la production restante.

Même avec des centrales nucléaires et des parcs éoliens supplémentaires, les experts pronostiquent des coûts de transports multipliés entre 2 et 10 d’ici à 2050.

> L’habitat individuel consomme beaucoup plus d’énergie que l’habitat collectif, à la construction comme au fonctionnement, notamment pour le chauffage. Les pays du nord de l’Europe l’on bien compris, la construction de lotissements est inexistante, les constructions nouvelles se font sur de l’habitat collectif confortable avec terrasse, très bas carbone, couplé à des espaces verts et parcs publics plus importants.

> L’étalement urbain engendre des surcoûts d’infrastructure pour les collectivités :

Les collectivités viennent de dépenser 5 millions pour élargir les ronds point de Pizançon, on prévoit encore 50 millions pour refaire un pont automobile entre Romans et Châteauneuf-sur-Isère : avec ça les collectivités aurez pu rénover l’hyper-centre de Romans qui tombe en ruine, où les commerces manquent de clients, ou bien greffer des balcons aux immeubles existant pour permettre aux habitants d’avoir des extérieurs confortables, relier Bourg de Péage à Romans avec une passerelle piéton et vélo pour changer des trottoirs de 50 cm de large, ou bien même construire 3 gymnases Vercors supplémentaires ou encore 10 Cités de la Musique…

Sur le pont neuf, des trottoirs étroits que se partagent cyclistes et piétons au milieu d’une circulation automobile dense et dangereuse

Mais comme on ne peut pas avoir fromage et dessert, les habitants devront se contenter des ronds points moches et des bouchons qui vont avec.

> L’artificialisation des sols assèche les nappes phréatiques

L’eau de pluie s’écoule directement dans les canalisation pour finir dans l’Isère, au lieu d’alimenter les nappes, et c’est de l’eau perdue pour l’été alors que l’agglomération était en alerte préfectorale sécheresse dès le mois de mars en cette année 2023 !

Construction de nouvelles zones commerciales à Pizançon, juste au dessus de l’Isère, les surfaces commerciales existantes dans l’agglomération étant déjà par habitant parmi les plus élevées de France.

> L’artificialisation des sols menace la souveraineté alimentaire, d’ici et d’ailleurs, puisque de nombreuses régions du globe inhospitalières vont dépendre de plus en plus de l’aide alimentaire, sans quoi elles généreront des flux migratoires.

De plus, avec l’explosion des prix des intrants agricoles, (eux aussi liés au prix des carburants), les agriculteurs vont avoir besoin de davantage de terre pour réduire la facture tout en maintenant la production. L’UE a d’ailleurs décidée de remettre en culture des terres en jachère.

Le moment est mal choisi de les détruire, surtout celles se trouvant à proximité des rivières, plus riches et plus facile à irriguer.

B.Pierre

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